"Tanné de vivre dans la souffrance, je souffle mes textes, ma seule délivrance.."
Troisième rencontre avec les Souverains
31 Décembre 2012
Troisième rencontre avec les Souverains
31 Décembre 2012
Je quitte ma cellule
Je traverse les couloirs
Je salue mes amis
Je leur dis " à plus tard "
Je n' quitte pas Bordeaux
du moins pas encore
je m'évade dans les mots
et la musique des noirs
Ma vie est un roman
Ma vie est une chanson
Qui en est l'auteur
c'est toute la question
Des questions que je me pose
en vers et en proses
Je te salue homme de paroles et d'histoires
Et je te plaide notre cause
Jamil
Bienvenue parmi les
Souverains anonymes
1- Salut Jamil, je m’appelle Jimmy. Nous sommes particulièrement contents de te recevoir à notre émission. Bienvenue aussi à ton ami LG Breton qui t’accompagne à la guitare. Comme tu sais ici à Souverains anonymes, tu es comme chez-toi. Tu es venu plusieurs fois. Aujourd’hui on t’accueille dans notre nouveau studio. Et on a hâte de t’entendre chanter sur notre nouvelle scène. En attendant faisons mieux connaissance. Jamil, avant de te relancer dans la chanson il y a une dizaine d’années, tu as été gérant d’artistes, prometteur, producteur, arrangeur et puis un jour, tu en avais marre d’être derrière les autres. Tu as décidé de passer devant. Et tu as très bien réussi. À travers plusieurs albums et plusieurs tournées, tu as imposé ton nom dans le showbizness québécois. Tout allait très bien jusqu’au jour ou tu as vécu un ACV. (Accident cardio-vasculaire). Ta carrière a été interrompue. Tu n’étais pas sûr si tu allais y revenir sur scène. Si tu allais joué à la guitare. Quatre ans plus tard, tu es de retour sur scène et tout dernièrement tu as parcouru le chemin Jean-Jacques Compostel pendant 40 jours en marchant 915 kl. La première question est importante, prends ton temps pour y répondre. Comment vas-tu maintenant Jamil Azzaoui.. ?
2- Bonjour Jamil, Je m’appelle Boncoeur. J’aimerais d’abord te féliciter pour cette longue marche thérapeutique que tu as fais jusqu’à Compostel. Personnellement, je n’aurais pas eu le courage… Jamil, nous avons écouté l’entrevue dans laquelle tu racontes les détails de ton accident cardio-vasculaire. Et dans les toutes premières minutes de l’entrevue, en parlant d’une possible tension que tu aurais vécu avec ta blonde, tu as glissé cette phrase « Le bonheur guérit de tout ». Tu voulais peut-être dire que le bonheur peut prévenir des maladies. Tu l’as dis avec une telle conviction que j’aimerais t’entendre développer si tu veux bien ?
Je suis d’accord avec toi Jamil que le bonheur peut prévenir et même guérir. Certains sont doués au bonheur. D’autres doivent apprendre à le cultiver. Moi, par exemple, j’ai connu bien des épreuves, bien des maladies. Même à Bordeaux, je souffre de plusieurs douleurs physiques, je te raconte pas les détails. Mais le sourire ne me quitte jamais. Je viens à Souverains anonymes, parce que ici, je ris.. Le rire me soulage. Le rire me tient à la vie et parfois au bonheur. C’est un honneur et un bonheur de te rencontrer. MERCI !
3- Bonjour Jamil, je m’appelle Michel. De toutes les chansons que j’ai entendues de toi « Délivre-moi » est celle qui me rejoint le plus. Une belle chanson, des paroles touchantes. Combien de fois moi aussi, je me suis dis « Je ne m’endure plus ». J’ai été durant 33 ans à vouloir me délivrer, mais de mauvaise façon. J’ai fais appel à toutes les drogues pour remplir le vide en moi. Mais je ne vivais qu’à moitié. À 47 ans et après une longue thérapie de 7 mois (que je n’ai pas fais à moité), j’arrive à cette conclusion. Y’a pas une drogue au monde qui va me donner tout l’amour que j’ai pour ma famille et que ma famille me porte. C’est aussi simple que ça. Je ne sais pas ce qui t’a inspiré les paroles de cette chanson, elle nous a tous rejoint et j’espère qu’elle fera le tour des centres de thérapie du Québec. Disons qu’en l’écoutant, on se sent moins seul. La chanson « Délivre-moi », tu l’as écrite avant, après ou pendant ta maladie ?
4- Bonjour Jamil, Je m’appelle Tshipamba. Je viens d’un des grands et riche pays au monde, le Congo Kinshasa. Ce n’est l’espace qui manque chez-nous, ni la belle nature pour faire des longues marches. Mais depuis 15 ans, il est impossible de marcher dans mon pays. À cause de toutes les guerres, les gens ne marchent plus. Ils courent. Pour éviter les balles. Pour éviter la mort. 6 millions de morts en quinze ans. Je me demande s’il ne faut pas faire des marches un peu partout dans le monde pour alerter l’opinion internationale sur ce génocide tranquille. Il existe des marches spirituelles, des marches religieuses, des marches philosophiques des marches romantiques. Il existe aussi des marches politiques. Des marches de l’espoir. La longue marche de Ghandi, la marche verte et celle des pains et des roses au Québec.. De toutes ces marches, à laquelle appartient la tienne ?
5- Bonjour Jamil, Je m’appelle Patrick. Je suis un vieux Souverain. J’ai été ici en 1990, j’ai rencontré Céline Dion et j’ai même participé à l’album des Souverains « Libre à vous ». Je suis de retour à Bordeaux uniquement pour te rencontrer. Je blague, mais à peine. À propos de marche, je vais faire un témoignage. Quand j’étais jeune en Haïti, j’ai accompagné ma tante dans une longue marche. Ma tante ne pouvait pas avoir d’enfants. Grâce à cette marche spirituelle, elle est devenue mère de deux enfants. Personnellement, je garde de cette marche au nord d’Haïti à Mont Gabrit, un souvenir des plus mémorables. J’avais huit ans, je me souviens comme si c’était hier. Avec mon grand frère, ma mère et ma tante, nous avions marché des kilomètres et des kilomètres. Nous avions traversé des montagnes, des vallées et parfois nous marchions dans l’eau avant d’arriver à la chappelle Notre-Dame. Au cours de cette marche, j’ai croisé d’autres enfants avec qui je passais mon temps à jouer tout en marchant. Quand je me trouve à Bordeaux, je m’offre une belle évasion en remontant ma mémoire jusqu’à cette marche de l’espoir dans laquelle j’ai été témoin d’un miracle. Et toi Jamil, de quel miracle, tu as été le témoin ou à quel miracle tu t’attendais..?
6- Bonjour Jamil, Je m’appelle Nourddine. Toi tu as fais Compostel, moi j’aimerais faire Dubai. Toi, tu as marché à pied, moi j’aimerais rouler en Bugati. Toi, tu as couché dans des auberges pauvres, moi j’aimerais coucher à l’hôtel du Burj Khalifa, la plus haute tour du monde. Toi tu as traversé des collines et des vallées, moi je vais prendre l’ascenseur, tout en regardant la mer à perte de vue. Toi, tu as scrappé tes godasses à force de marcher 25 kl par jour. Moi je vais faire du shopping dans les riches galeries de Dubai pour acheter des souliers italiens à 3000$ la pair. À Dubai, avoir une Mercédès, c’est comme avoir une Honda Civic. Il faut être concierge pour avoir une Mercédès. Ceci dit, je ne vivrai pas plus qu’une semaine à Dubai. Ça sera mon pèlerinage après Bordeaux. Après, je reviendrai à la réalité. À Alger, je mangerai mes sandwichs aux merguez au bord de la plage. Quand je serai plus vieux, j’irai accomplir mon pèlerinage à la Mecque en traversant plusieurs pays. Ça sera un pèlerinage à l’ancienne. Jamil, une de tes chansons s’appelle « les moitiés ».
7- Bonjour Jamil, Je m’appelle Garry. À propos de ta chanson « Les moitiés », une chose que je ne voudrais pas faire à moitié, l’éducation de mon fils. Je ne voudrais pas faire avec lui ce que mon père a fait avec moi. Je voudrais donner à mon fils ce que je n’ai pas reçu de mon père. Sa présence. Je sors bientôt, je vais consacrer à mon fils tout le temps qu’un père doit donner à son fils. Du bon temps. Jamil, tu es le père d’une fille. Pour son éducation, qu’est-ce que tu n’as jamais fais avec elle à moitié..?
8- Bonjour Jamil, c’est encore Jimmy, moi aussi, la seule façon pour moi de me délivrer de moi-même, c’est quand j’ai pris la décision d’arrêter de consommer. La naissance de mes deux enfants a joué un grand rôle dans cette décision. Je n’ai pas fais encore de marche thérapeutique, mais j’ai fais trois thérapies non complétées. C’est dans ces thérapies que j’ai appris à vider mon sac dans des écris. Des raps que je me chantais tout seul. Mais à Souverains anonymes, je les partage avec plaisir. Merci d’avoir écris cette belle chanson « Délivre-moi ». Quand je l’ai entendu, je me suis dis « Délivre-moi de moi et laisse le bien en moi ». C’est devenu un rap que voici : (…….). Jamil, continue d’écrire de si belle chanson.
9- Bonjour Jamil, Je m’appelle Chafik. Tunisien d’origine. De l’âge de 17 à 22 ans, j’ai fais 5 ans de prison. En écoutant ta chanson « Il faut que tu changes », je me suis senti visé avec raison. Parce que je ne peux pas m’imaginer encore de retour ici. Disons que j’ai tendance à réagir violemment lorsqu’on m’attaque. Finalement, c’est toujours moi qui perds. Je ne veux plus perdre. Je dois changer. Je dois revoir certains comportements. Parce que je sais que je suis un garçon gentil, serviable, charmant. Je n’ai pas eu d’enfance malheureuse. Je n’ai rien à reprocher à mes parents. Je n’ai aucune raison de ne pas évoluer. Merci Jamil d’écrire des chansons aussi positives et aussi inspirantes.
10- Bonjour Jamil, Je m’appelle Mario. J’ai commencé à faire du temps en 85. Je suis tanné et écœuré de la prison. Je le dis devant toi et devant tous mes amis Souverains : La prochaine fois que tu vas me voir, ça sera dehors, au Petit Medley. Je prendrai un verre à ta santé. Un verre de tisane. Je serai accompagné de ma vieille qui ne m’a jamais lâché. Celle qui a souffert pour moi et avec moi. Je ne voudrais plus la lâcher. J’ai beaucoup aimé quand tu as dis que le bonheur guérit de tout. Ça m’a pris du temps avant de le comprendre. Mais vaut mieux tard que jamais. Aujourd’hui, le bonheur c’est de te rencontrer. MERCI Jamil.
11- Bonjour Jamil, Je m’appelle Anson. J’ai appris à me délivrer de moi-même, le jour que j’ai arrêté de chercher ce que je ne pouvais pas obtenir. Mais pour ça, je devais mettre beaucoup de volonté. Un évènement majeur m’a aidé à y arriver. Je suis tombé diabétique à 34 ans. J’ai failli perdre la vue. Aujourd’hui avec la bonne médication, je vis comme un homme normal. Parfois, la maladie, la meilleure chose qui peut arriver à quelqu’un pour l’aider à se délivrer de lui-même.. Depuis ton ACV, te considères-tu un homme plus heureux qu’avant..?
12- Bonjour Jamil, Je m’appelle Pierre. Je suis venu à Bordeaux pour une seule raison. C’est pour entendre la chanson « La tendresse ». Je m’appelle Pierre Guichard, comme Daniel Guichard. Celui qui chante la Tendresse. Je trouve que toi aussi à ta manière, tu la chantes bien surtout dans ta chanson « Pitié pour les femmes ». Est-ce que je me trompe..?
13- Bonjour Jamil. Comme toi, je suis marocain. J’ai déjà eu le plaisir d’entendre ton album Pitié pour les femmes. Ton pèlerinage à Compostel m’a donné envie de réaliser un rêve. Quelques mois avant mon entrée en prison, j’avais promis à ma mère de l’amener à la Mecque pour accomplir une OMRA. Aussitôt après ma sortie de Bordeaux, bientôt inchallah, je me promets de réaliser ce projet pour moi et pour ma mère. Le pèlerinage est une vieille tradition qui date bien avant l’arrivée de l’Islam. Je sais déjà que cela va me faire du bien.. Ça va être ma façon de me délivrer de Bordeaux. MERCI!
14- Jamil, Comme tous mes amis, je suis très content d’être ici au Souverains anonymes pour écouter tes paroles et ta musique. Tu es accompagné de LG Breton à la guitare. C’est le moment tant attendu de notre rencontre. À vous de jouer et à nous de vous applaudir.
15- Jamil Azzaoui, après ta maladie et ta longue marche, toi aussi tu viens de loin.. À Souverains anonymes, tu es venu planter tes mots et ta musique. Nous en garderons plus qu’un bon souvenir. Je te souhaite le succès dans ta carrière. Mais surtout la santé dans ta vie. Quand la santé va tout va.. Merci à LG Breton de t’avoir accompagné à la guitare. Aux noms de tous mes camarades, je vous déclare, Jamil Azzaoui et LG Breton, Souverains anonymes.
Extra:
16- Bonjour Jamil, le jour de mes 18 ans, j’ai écris une lettre avant de m’accrocher le cou dans la salle de bain. Par hasard, cinq minutes après, mon coloc est rentré juste à temps pour me décrocher. Quand il a lu ma lettre, il a écrit une suite qui est devenu une chanson rap. Je suis condamné à vivre et la chanter. La voici :
Tanné de vivre dans la souffrance, je souffle mes textes, ma seule délivrance, sorte d’ivresse qui fait que je pense, qui me fait voir que ma vie ça n’a plus de sens, sans savoir comment je brise le silence, tanné de tout faire de travers, je traverse les années qui me mènent la l’enfer, l’envers de la médaille des gens qui vivent vieux, je vois rien de bon, du moins pour moi, rien de mieux, que le bizness, devoir me battre pour vivre, je visualise puis je stresse, très souvent, je blesse les gens que j’aime, je récolte sans avoir semer, la haine envahis les miens.
Tanné de vivre pour me défendre, je me défonce, tanné de vivre dans l’ensemble, je ressemble à une track live que personne n’a envie d’entendre.. je veux entendre le dernier clic de ma vie, celui de la détente, sur ma tempe, trop souvent, je tremble et je trempe, d’un coup foireux, je me fou de tout sauf de voir mes boys malheureux, le mal de vivre de ceux, sur le seuil de partir, je parie quand deux jours on m’oublie ou que c’est de ma gueule qu’on rit , je renie tout ceux a qui j’ai dit en toute confiance, je me confie à celui qui est Mon shadow, qui sent le mal de vie qui m’envahi. so respect boy… Je veux qu’on ferme les yeux sur ce qui me rend confus, ce qu’on fait, se qu’on confie, avec confiance, qu’on construit avec méfiance, face au reste j’essaye de garder une constance.. MERCI
©M.L. 2012