«Il fut un temps où... »
Si j’avais été à la place de Haroun Bouazzi, dans son allocution au gala de la Fondation Club Avenir, j’aurais moi aussi souligner « que je vois ça à l'Assemblée nationale tous les jours, la construction de cet autre » Mais ce n’est pas sur son appartenance ethnique et culturelle que j’aurais mis l’accent « qui, par définition, serait dangereuse ou inférieure ».
À mes yeux l’autre avant qu’il ne soit « maghrébin, musulman, noir ou autochtone », il appartient d’abord à une classe sociale qui brille par son absence au Parlement du Québec.
Y a t-il un plombier à l’Assemblée Nationale?
Parmi nos honorables élus, y a t-il un menuisier? Un cultivateur, un barman, une waitress, un ancien BS, un ex-détenu, une ancienne travailleuse du sexe, un jardinier, un travailleur de construction, un cordonnier, un boucher, une boulangère ou un coiffeur ? Imaginez un homme ou une femme député(e) issu(e) de ces métiers sans lesquels, nous sommes rien!
Comment notre démocratie peut-elle prétendre être réellement représentative si nos élus proviennent en majorité des mêmes domaines, des mêmes intérêts et surtout de la même classe sociale?
Si j’étais un député à l’Assemblée Nationale, ce n’est pas sur le terrain identitaire que j’aborderais les enjeux de société. Si j’étais un député, je ne m’attaquerais pas à la crispation identitaire par une autre crispation tout aussi identitaire. Je ne répondrais pas au populisme par un autre populisme. Le racisme pour moi, c’est d’abord, un conflit de classe avant de prendre une forme identitaire. Le riche, peu importe son appartenance culturelle, il se comporte comme un riche. En éthnicisant les questions du racisme, on ne fait que le provoquer davantage. Il fut un temps où nos débats et nos combats de société avaient pour objectif plus d'égalité. Aujourd'hui, c'est le combat pour l'identité qui les accapare et les empoisonne!
Ruba Ghazal vient d’être nommée co-porte-parole de Québec Solidaire! Une québécoise avec des racines palestiniennes dont elle est fière. La première femme d’origine arabe à la tête d’un parti politique au Québec. Cet évènement, en lui-même, contredit un peu le discours de Haroun.
Cela étant dit, à l’Assemblée Nationale, Ruba continuera à défendre les intérêts de toutes les québécoises et tous les québécois, peu importe leur appartenance culturelle et sociale. N’est-ce pas Ruba?
En attendant qu’un plombier siège à l’Assemblée Nationale, pour donner à la démocratie québécoise une plus grande crédibilité, arrêtons d’éthniciser les enjeux politiques de toute une société.
Mohamed Lotfi