"Aussi légère qu’un drapeau dans le vent Un drapeau de liberté, un drapeau blanc"
Comédienne
26 Septembre 1996
Comédienne
26 septembre 1996
J'ai levé les yeux au ciel
Jeudi le 26 septembre 1996
Sainte Vierge
Dis-moi que je rêve
c'est Mirandolina en personne
Aussi légère qu’un drapeau dans le vent
Un drapeau de liberté, un drapeau blanc
Aubergiste d'un jour, je t’offre mon coeur
L’amour est rare, mais il existe encore
Sylvie Drapeau
Bienvenue parmi les
Souverains anonymes
0- Nous allons commencer notre émission aujourd’hui par un hommage que nous voulons rendre à une grande femme du théâtre au Québec qui a été une des invités des Souverains anonymes. Alors j’invite tous le monde à observer un moment de silence en hommage à Madame Rose Ouillette, La Poune. (Un moment de silence + un extrait de l’émission avec la Poune).
1- Bonjour Sylvie, aujourd’hui les portes de notre château et celles de nos coeurs s’ouvrent à toi. Tu es une de nos plus grande comédienne de théâtre, tu es aussi une femme très discrète. Tu n’accordes pas trop d’entrevues. Je te comprends. Les journalistes ne sont pas toujours aussi gentilmans que nous les Souverains anonymes.. Sylvie, beaucoup parmi nous, n’ont jamais vu une pièce de théâtre. Pour nous le théâtre est une planète mystérieuse qui se trouve à des années lumières.. Mais il n’est pas trop tard pour nous d’explorer cette planète dont tu es aujourd’hui la messagère.. Alors, commençons par faire connaissance. Sylvie, tu es une fille de la côte nord très attachée à tes origines. Quel genre d’enfance as tu vécu dans le nord .? Quel genre de petits rôles tu t’amusais à jouer pour tes copains et tes copines, pour tes voisins et tes voisines..?!?
2- Sylvie, moi aussi quand j’étais petit je rêvais de devenir comédien ou acteur de cinéma. Mais ce n’est pas un rêve qu’on réalise facilement. Comment es-tu arrivé au théâtre: Par un coup de foudre..? Par l’École nationale de théâtre..? Ou par hasard..? Parle-nous un peu de ta carrière..?
3- Sylvie, en devenant comédienne tu as réalisé un rêve d’enfance. Mais d’où te vient ce besoin vital de porter des masques et d’incarner des personnages aussi différents..?
4- Sylvie, avoir des bébés c’était aussi ton rêve d’enfance. Aujourd’hui, tes enfants sont des personnages. Est-ce que pour toi avoir un enfant ça pourrait enrichir ou démolir la carrière d’une comédienne..?!?
5- Sylvie, quand on est une comédienne de théâtre aussi submergée et aussi heureuse sur scène, est ce qu’on est pas très frustrée de jouer des personnages de téléromans ou de cinéma sur lesquels on a pas tout le contrôle..?
6- Sylvie, tu es une de nos comédienne les plus prolifiques. Il t’arrive de jouer dans cinq pièces par années. Ça veut dire pendant que tu joues un rôle, tu te prépares pour un autre. Est-ce que ça t’es déjà arrivé sur scène de mélanger les textes de deux personnages et de passer de Lulu à Mirandolina ou à Thérèse par exemple.. Autrement dit Sylvie, avec tous ces personnages dans ta tête, comment fais-tu pour échapper à la visite du psychiatre..?
7- Sylvie pour un comédien ou une comédienne le corps est un instrument fondamental pour faire vivre des personnages. Il paraît que tu as déjà joué un personnage qui n’a de corps que la tête. Je n’ai pas eu le privilège de voir cette pièce, mais il m’arrive ici dans ce grand théâtre qui est la prison de Bordeaux de jouer un personnage qui n’a de corps que le corps et la tête est ailleurs.. Au théâtre de Bordeaux les têtes sont ailleurs. Tout le monde peut comprendre ça. Mais que représente l’absence du corps dans une pièce de théâtre..?
8- Sylvie, personne de nous ne t’a déjà vu sur au théâtre. Mais nous avons lu beaucoup de choses sur toi. Mohamed nous a parlé beaucoup de toi et de ton interprétation du personnage de Mirandolina. Nous savons à quel point le théâtre est important dans ta vie. Pour toi le théâtre c’est la lumière dans la nuit. Mais malheureusement beaucoup de gens n’ont pas accès à cette lumière. Ils sont toujours plus nombreux à regarder le hockey qu’à admirer Andrée Lachapelle dans « Soudain l’été dernier » ou Sylvie Drapeau dans « La locandiera ».. Dis-moi Sylvie, est-ce que le théâtre au Québec est condamné à rester aussi marginal..?!?
9- Sylvie, toi avant de monter sur scène on te dit merde pour te souhaiter bonne chance . Moi, avant de passer devant le juge je me suis dis merde. Mais ça ne m’a pas porté bonne chance. Au contraire, je suis dans la merde. Excepté ce moment de bonheur devant toi. Dis-moi Sylvie, quel est le rapport entre la merde et la chance..? D’où vient ce rituel merdique..?!?
10- Sylvie, je t’invite à une situation qui pourrait t’arriver dans ta carrière de comédienne: Tu es sur scène, tu joues le personnage de Mirandolina de la pièce La Locandiera. Ton rôle est celui d’une aubergiste qui héberge trois pensionnaires: Un aristocrate, un commerçant et un intellectuel.. Au milieu de la pièce un fait inusité arrive. Il se trouve que par hasard, je suis parmi les spectateurs. Épris par l’action dramatique, je me lève. Je me dirige vers la scène. Je monte sur scène. Je me présente à toi Mirandolina et je dis:
« Belle aubergiste, je suis un évadé de prison. Je voudrais pour quelques jours passer d’une cellule à une chambre. Je ne suis ni un célébrissime aristocrate, ni un vulgaire commerçant, ni un prétentieux intellectuel. Je suis un bum, un gars ordinaire, un évadé de prison. Mais je ne suis pas dangereux. J’ai seulement soif d’amour et de liberté. Belle Mirandolina, avant de prendre une place dans ton coeur, pourrais-je prendre une chambre dans ton auberge..? »
11- Salut Sylvie, je m’appelle Romain. Moi, par l’écriture je suis tombé en amour avec une perle rare. Toi Sylvie, tu as déjà dis que l’amour est rare. Moi, je dis que l’amour est rare mais il existe encore. Je ne te demanderais pas quelles sont les qualités que tu aimes chez un homme. Je voudrais savoir quelle est ta définition de l’amour..?!?
12- Sylvie, je sais que ton mot préféré c’est « éternité ». Mon mot préféré c’est « liberté ». Si je suis à Bordeaux c’est par excès de liberté.. A Bordeaux, je me suis fais cette réflexion: « Dans la vie on ne peut pas tout faire au nom de la liberté. On ne peut pas tout faire au nom de l’amour comme on ne peut pas tout faire au nom de Dieu. Par contre, on peut presque tout faire, à condition que ça ne fasse de mal à personne ». Toi Sylvie, tu fais du théâtre pour faire du bien aux autres, est-ce que c’est là que tu atteints le sens de éternité..?!?
13- Bonjour Sylvie, je ne sais pas si je suis un bon comédien, mais je sais que je me débrouille bien dans la chanson: (Abdel chante). Sylvie Drapeau, d’autres belles femmes avant toi me l’ont dit. Marina Orsini, Macha Grenon, Marie Philippe et même Guilda me l’a dit. Elles m’ont toutes dit que j’ai une belle voix. Dis-le moi toi aussi, je serais comblé..
14- Sylvie, ton bonheur c’est de raconter des histoires et d’être écoutée par les autres. Nous les Souverains anonymes, notre bonheur c’est dans les moments d’évasions qu’on réussi à réaliser par l’écriture. On écrit des lettres, des chansons et des poèmes.. Je te demande Sylvie de nous faire l’honneur d’interpréter quelques poèmes crées par nous derrières ces murs café-crèmes.. A toi de jouer et à nous d’applaudir.. (applaudissements).
15- Sylvie, c’est vrai que pour nous le théâtre est une planète mystérieuse. Et pourtant nous nous considérons à notre façon des comédiens. Notre théâtre est une prison. Nos spectateurs sont des gardiens et nos salaires sont les sourires excités de nos blondes à notre sortie. Mais je ne souhaite à personne de jouer un personnage sur la scène de Bordeaux.
Sylvie Drapeau, avec toi aujourd’hui, nous avons été nous-mêmes. C’est un bonheur et un privilège d’être soi-même au théâtre de Bordeaux. De ton passage parmi nous, nous garderons le souvenir d’une femme généreuse qui sait donner beaucoup aux autres tout en gardant un peu pour elle. Tu parleras de nous à d’autres comédiens et comédiennes. Tu leur diras qu’ils sont les bienvenus parmi les Souverains de Bordeaux pour lire nos créations. Au nom de tous mes camarades, je te déclare Sylvie Drapeau, Souveraine anonyme... (applaudissements).