"Tu es dans le quartier invisible de Montréal Tu es au coeur du temple du temps"
Auteur, compositeur, interprète
19 Décembre 1996
Auteur, compositeur, interprète
19 Décembre 1996
La complainte du phoque en Alaska!
Je voudrais voir la mer!
Je voudrais voir la mer!
Vu par les Souverains aujourd'hui.
Jeudi le 19 décembre 1996
« Michel, je vais te dire où tu te trouves:
Tu es dans le quartier invisible de Montréal
Tu es au coeur du temple du temps.
Un quartier que personne ne veut explorer de peur de s’y perdre.
Ce quartier est habité par ceux qui n’ont plus rien à perdre.
Dans notre quartier le soleil transforme le rose en noir.
La lune se cache de chagrin et d’espoir.
Les étoiles se racontent des histoires.
Cela n’a rien d’un cauchemar.
Cela est un voyage au bout du noir.
Si tu n’a pas peur de perdre ton mouchoir,
tu partageras avec nous le fruit du hasard.. »
Michel Rivard
Bienvenue parmi les
Souverains anonymes
1- Salut Michel. Cela fait longtemps que les Souverains de Bordeaux désirait te voir dans leur quartier. Maintenant que tu es de passage parmi nous, crois-moi, on va en profiter. Tu es accompagnés de Mario Légaré, qui n’est pas à sa première récidive. Salut Mario. Michel, il y a encore quelques montréalais qui ne connaissent pas très bien Michel Rivard. Eux aussi ils sont de passage dans le quartier de Bordeaux. Il y en a qui ont vécu comme toi à Villeray, à Montréal Nord et dans la rive sud. Le hasard fait que c’est à Bordeaux qu’il vont faire ta connaissance. Pour commencer, parle-nous de ton enfance à Villeray et à Montréal Nord..?!?
2- Salut Michel. D’après ta chanson « Oh petits enfants », j’ai compris que tes enfants, ne pourront pas te reprocher d’être aussi absent que ton père l’était. J’ai compris aussi d’après ta chanson « Tu peux dormir » que même si ton père n’était pas aussi présent comme tu voulais, tu gardes pour lui une grande affection. Moi aussi j’ai des enfants pour qui je voudrais être plus présent. Surtout depuis que je suis à Bordeaux. J’ai peur de perdre leur amour et leur estime. Ils ont autant besoin de moi que moi j’ai besoin d’eux. Toi Michel, qu’est-ce que tu voudrais donner à tes enfants que tu n’as pas eu de ton père..?
3- Salut Michel, je m’appelle Cline. Comme toi j’ai vécu longtemps sur la rive sud à St-Hubert. A 19 ans, j’ai quitté ma famille pour aller rester seul en appartement à Montréal. Ma vie a complètement changé depuis que je reste seul. Aujourd’hui, les jeunes sont pressé d’aller rester seul. Il y’en a qui quitte la maison à 14 ans. Je sais que toi Michel tu es restés plus longtemps dans ta famille. Si t’avais quitté la maison plus jeune, est-ce que ça aurait influencé ta carrière..?!?
4- Salut Michel. Tu es d’abord un auteur-compositeur-interprète. Mais il faut croire aussi que tu te débrouilles très bien dans l’humour et la comédie. Je t’ai vu dans « les parlementeries » et je ne t’ai pas oublié. Je me demande finalement si tu ne mènes pas deux carrières de front. Comédien et chanteur. J’ai remarqué aussi que lorsque tu chantes, tu es plutôt triste. Quand tu joues, tu es plutôt drôle.. Est-ce que je me trompe..?!?
5- Salut Michel. Je sais que tu as écris des chansons rocks pour Offenbach et pour Jerry Boulet. Mais dans tes albums à toi, surtout le dernier, le rock n’est pas ta marque de commerce. Je dirais plutôt que tu es un chanteur romantique et impressionniste. Je veux savoir c’est cela est dû à tes études en littérature ou à ton caractère personnel. Je veux savoir aussi si dans un prochain album, tu vas rester aussi romantique, aussi impressionniste et aussi intelligemment naïf..?
6- Salut Michel. Tu as déjà dis dans une entrevue que ça n’a rien avoir avec la nostalgie le fait que dans certaines chansons tu soulignes des souvenirs de quartiers de ton enfance. Pour toi la nostalgie, ça veut dire que ça va tellement mal au présent qu’on s’ennuie du passé. Alors Michel, tu peux imaginer combien je suis présentement un grand nostalgique. Le quartier de Bordeaux est habité par des nostalgiques anonymes. Mais dans mon cas, je me sens plus nostalgique de mon avenir car c’est à cause de mon passé que je subis mon présent. Il n y a que dans le quartier de Bordeaux à Montréal où on peut vivre la nostalgie à l’envers. Dis-moi Michel, as-tu déjà vécu des situations qui te donnait la nostalgie d’un avenir meilleur..?!?
7- Salut Michel, je m’appelle Ronald, à l’âge de 19 ans j’ai quitté Port-au-Prince pour arriver à Montréal. C’était juste après le départ de Bébé Doc. Lui, il s’est installé sur la côte d’azur en France. Moi, je me suis installé au coeur de Brooklyn de Montréal (à St-Léonard).
Lui, il ne sort jamais de sa villa les mardis après-midi, parce que c’est le jour de la collecte des ordures. Moi, de Brooklyn j’en garde des bons souvenirs, mais je ne voudrais pas que mes enfants vivent là parce que la vie à Brooklyn c’est la vie de ghetto et on sait ce que ce genre de vie peut faire à quelqu’un. Ce n’est pas pour rien que beaucoup de jeunes haitiens se trouvent à Bordeaux. Michel Rivard, tu es celui qui a chanté le plus et le mieux Montréal, ces rues, ces quartiers, sa montagne, sa lune d’automne, sa rive sud et sa rive nord. Michel, t’es encore jeune, ta carrière est loin d’être terminé. Puisque tu aimes tant Montréal, quelque chose me dit qu’un jour tu vas chanter Brooklyn, Parc extention et Rivières-des-prairies pour raconter la vie de ghétho qui existe à Montréal et que beaucoup de montréalais ignorent ou font semblant d’ignorer. « Histoire d’amour et de crime dans un ghetto de Montréal », c’est un beau titre de roman. Est-ce que ça peut être le titre d’une chanson de Michel Rivard..?!?
8- Salut Michel, je m’appelle Michel. Je suis déménageur de métier, mais quand je suis à Bordeaux, je deviens le géant Beaupré. A toutes les nuits un gardien pas très fou vient me parler pour tuer l’ennui. A Bordeaux, les prisonniers comptent les jours. Les gardiens comptent les nuits et moi je compte sur toi Michel Rivard pour me dire si on peut être fou sans être bête..?!?
9- Salut Michel, je m’appelle Robert. Je suis du Plateau Mont-Royal. Un quartier que tu dois bien connaître. A travers mes passages à Bordeaux, j’ai appris à jouer de la guitare. D’autres apprennent à ouvrir un coffre fort. Je ne te le souhaite pas Michel, mais si tu devais faire du temps en dedans, qu’est-ce que tu apprendrais:
- A jouer de l’orgue dans la chapelle..?
- A ouvrir le coffre fort d’une des banques qui viennent faire des profits de 6 milliards..?
- Ou à écrire un livre sur l’amour dans les ruelles de Montréal..?!?
10- Salut Michel. Parlons un peu des banques. Des études révèlent un appauvrissement croissant des enfants au Canada. On demande à chaque citoyen de faire sa part pour réduire le difficit. Il y a des hommes et des femmes qui quittent les prisons avec comme fortune un tiquet d’autobus. Pendant ce temps là, les banques du Canada font des profits dépassant les 6 milliards de dollars. Si les banques continuent de faire des profits aussi indécents et scandaleux, à l’an 2000 les gouvernements vont légaliser le vol des banques avant même de légaliser les drogues douces. Michel, je ne te demanderai pas si tu as l’intention de faire une chanson contre les banques. Toi, comme moi, comme tous les gouvernements nous sommes très impuissants devant la mainmise des banques.. Je veux savoir si cette impuissance devant les banques est comparable à l’impuissances des chanteurs francophones devant les radios commerciales qui décident et dessinent la carrière des chanteurs selon leurs intérêts..?!!?
11- Salut Michel, je m’appelle Réjean. J’ai 39 ans, j’ai quitté Port-au-Prince à l’âge de 23 ans. J’ai vécu quelques années au coeur du quartier Parc-Extention à Montréal avant de passer au Centre de Détention. Je ne compte plus mes passages à la prison de Bordeaux. Mais quand je suis à Bordeaux, c’est pour m’évader de Parc-Extention. Dois-je rappeler que c’est le quartier le plus misérable de Montréal. Je ne te raconterai pas Michel toutes mes galères, mais malgré tout ça je n’ai jamais oublié une chose. Mes leçons d’histoire à l’école en Haïti. Je vais même te citer un extrait (..........).
Toi Michel, tu n’as pas oublié tes leçons de littérature à l’UQAM. Ça t’a aidé à écrire des belles chansons. Mais, est-ce que tu te rappelles de tes cours d’Histoire..?!?
12- Salut Michel, je m’appelle Daniel. Je fais partie des rares québécois qui ne connaissent pas par coeur ta chanson « Le phoque en Alaska ». Par contre je connais par coeur toutes les chansons d’Enrico Macias. Je suis présent à tous ses spectacles, que ce soit à Montréal, à Paris ou à Casablanca. Dans le bar de mon père sur Côtes des neiges, je n’écoutais que lui. Il fallait que je vienne à Bordeaux pour découvrir Beau Dommage et Michel Rivard. A Bordeaux, j’ai surtout pris conscience qu’à Montréal il y a plus que deux solitudes. Je me demande si certains politiciens ne devraient pas faire un tour dans le quartier de Bordeaux pour avoir une meilleur vision sur Montréal.. Qu’est-ce que tu en penses Michel..?!?
13- Salut Michel. Sais-tu que tu n’es pas le seul à croire que le Québec devrait d’abord se séparer de Jean-Marc Parent..? Il y a Mohamed aussi qui pense la même chose que toi. Et moi je pense que si le Québec devait se séparer de tout les imbéciles qui l’habitent avant de se séparer du canada, il ne se séparera jamais. Ne crois pas que je vais te poser une question politique. Mais comme tu n’a pas l’air de manquer de lucidité, je veux juste savoir comment tu appréhendes notre entrée prochaine dans le 21 unième siècle..?!?
14- Salut Michel, je m’appelle Vladimir Lecompte alias Popo. Moi, je suis né à Côtes des neiges de parents haïtiens. Entre ma naissance et aujourd’hui, j’ai exploré plusieurs quartiers de Montréal: NDG, Montréal Nord, Parc extention, Villery et Longeuil. Actuellement, j’explore le quartier de Bordeaux. J’ai des problèmes avec ce quartier là. Depuis quelques mois que je cherche un taxi, j’en ai pas vu un encore. Je n’ai pas vu d’autobus ni de station de métro non plus. Je vois beaucoup d’avions dans le ciel, mais je n’ai pas trouvé l’aéroport. Mais le vrai problème Michel dans le quartier de Bordeaux c’est que le temps n’a pas de passé ni d’avenir. Dans ce quartier, on ne peut même pas escalader un arbre pour voir l’autre côté du temps. A Bordeaux, il n‘y a pas d’arbre. Bordeaux est un quartier de briques. Parfois, j’ai l’impression que mon passé n’existe que dans ma tête. Heureusement, il existe des chansons pour me rappeler que Montréal existe pour vrai. Quand j’entends une chanson sur Montréal, je me dis que j’existe. Mais les montréalais ne savent pas qu’il y a des chansons qui rappellent que le quartier de Bordeaux à Montréal existe pour vrai aussi. Des chansons écrites et composées par nous les Souverains anonymes. Michel Rivard, en attendant de rendre publique nos chansons dans un album, je te demande au nom de tous mes camarades, même si ce n’est pas facile d’être amoureux à Montréal de nous rappeler que cette ville existe toujours avec ses taxis, ses autobus, sa montagne, sa rive sud, sa rive nord, et sa rue du bonheur « St-Laurent coin Ste-Catherine ». (Applaudissement)
15- Michel Rivard. C’est vrai que le temps qui passe est un méchant. On ne rattrape jamais le temps perdu. On se contente du temps qui reste. Dans le quartier de Bordeaux le temps vient et revient. Ce n’est pas toujours vrai qu’il faut avoir mal pour se faire du bien. Dans le nord de la ville d’une ville du nord, il y a une prison sans automne, sans lune, que des remords, que des remords. Michel Rivard, aujourd’hui avec tes chansons tu nous a bercé à l’eau de source et l’eau de mer. De ton passage, nous garderons le goût de dormir sur un nuage. Sources de toutes les saisons. Sources de toutes les sources. Au nom de tous mes camarades, je salue particulièrement ton musicien, Mario Légaré à la basse et je vous déclare souverains anonymes..(applaudissements).
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Michel Rivard
Programme
1- Rive sud.
2- Jaloux.
3- Je voudrais voir la mer.
4- Cheffreville.
5- Le coeur de ma vie.
6- Le goût de l’eau.
7- Parlant de la paix.
8- La lune d’automne.
9- Le phoque en Alaska.
10- Liberez le trésor.
Le goût de l’eau.
Dans le quartier de Bordeaux, on ne boit que de l’eau. C’est pour ça qu’on a toujours soif. Soif de l’autre eau. Celle qui goûtte le ventre de la terre
Celle qui goûtte le ventre d’une femme.
Celle que tu ne bois jamais dans un verre.
Le coeur de ma vie
Comme un poète indien il écoutait le vent
Comme un Arfan-des-neiges il déplassait le silence
Et comme lui même, il rappaillait les mots
Il aimait son pays
Il aimait sa langue
Ils étaient le coeur de sa vie
et la vie de son coeur
Gaston Miron est mort
Mais sa voix résonne encore
Vive le poète
La lune d’automne.
Je suis l’homme d’une femme